PAROLES D’ACTRICE – JUSTINE MASIKA BIHAMBA, sœur de cœur

Paroles d'acteur.rice.s Droits des femmes

Membre fondatrice de la Synergie pour les Femmes Victimes de Violences Sexuelles (SFVS) dont elle préside aujourd’hui le conseil d’administration, Justine Masika Bihamba fait figure de porte-étendard dans son pays. Quel qu’en soit le prix.

Une opportunité plutôt qu’un choix… en tout cas au début. Lorsqu’elle décroche son premier emploi juste après ses derniers diplômes, Justine Masika Bihamba ne se doute pas un instant que le virage qu’elle vient d’aborder fixera définitivement le cap d’un engagement qui dépassera largement le cadre professionnel. Durant ses 12 années au sein d’une organisation promouvant les droits des femmes paysannes en milieux reculés, la native de Goma (République Démocratique du Congo) mesure en effet le poids du silence auquel ses « sœurs », souvent abusées sexuellement, font face. « C’est là que j’ai vraiment compris qu’en tant que femme, nous ne pouvions pas vraiment parler ». Nous sommes dans les années 90, et Justine Masika Bihamba fait définitivement de la lutte contre les violences sexuelles « une vocation ». Quelques décennies plus tard, elle porte toujours haut la voix de « celles qui s’ignorent. La RDC est en guerre depuis 20 ans et c’est toujours la femme qui, au sein de la famille, porte les charges de la survie. Le patriarcat a fait que certaines ont totalement oublié leurs capacités et leur force pour faire changer les choses. On veut les voir actrices du changement et représentées dans les prises de décisions », revendique celle dont la structure prend en charge les victimes de violences dans pays sans cesse minée par les conflits.

PROPOSÉE AU PRIX NOBEL DE LA PAIX

Le crédo de SFVS ? S’unir pour être plus fortes ! Pour cela, la plateforme – qui réunit aujourd’hui 35 organisations – accompagne les victimes tout en s’attaquant aux causes, qui vont de l’exploitation illégale du minerai à l’absence de réforme de sécurité. « Sans oublier les coutumes qui ne respectent pas les droits des femmes que l’on considère comme inférieures, et bien entendu l’impunité généralisée qu’il règne chez nous », ajoute Justine Masika Bihamba. Les menaces ? Du haut de ses 56 ans, celle qui affiche une foi invétérée les connaît. Gouvernement, groupes armés : les risques peuvent venir de tous bords, et c’est une des raisons pour laquelle Agir Ensemble pour les Droits Humains contribue à mettre hors de danger des victimes dont il faut également assurer un suivi médical, psychologique, et parfois juridique. Proposée au Prix Nobel de la Paix en 2005 pour son combat contre les violences sexuelles faîtes aux femmes, Justine Masika Bihamba poursuit sa route avec autant de fierté que de courage. Et rêve d’un pays apaisé où les femmes occuperaient une place aussi déterminée que déterminante.

Damien Guillou


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